Comme dans tout massif montagneux, l’eau revêt des formes très différentes d’une saison à l’autre : en glace vive ou en neige poudreuse durant l’hiver, le reste de l’année elle se fait fougueuse dans les torrents et lisse comme un miroir dans les lacs. Dans le Vercors, l’eau joue un rôle original : elle s’infiltre, façonne et invente des mondes invisibles qu’elle creuse dans le calcaire.

L’immensité du monde souterrain

Massif karstique, le Vercors est doté d’un dense réseau de grottes, gouffres, avens et galeries souterraines qui ont attiré les explorateurs dès le XIXe siècle. Le célèbre gouffre Berger, la grotte de Choranche ou encore la grotte de la Luire sont autant de cavités qui témoignent de l’œuvre tenace de l’eau depuis des millénaires. En été, les grottes du Vercors sont des havres de fraîcheur salvateurs qui offrent une immersion fascinante dans l’histoire géologique de la montagne. Riche de plus de 3000 sites souterrains connus aujourd’hui, le Vercors est un haut-lieu de pratique de la spéléologie, activité nature accessible à tous. Aux côtés de professionnels, les grottes des Eymards, de la Ture, de la Goule Verte ou des Ferrières deviennent des terrains d’aventure souterraine.

Choranche ©itinera magica

Shoot d'adrénaline aquatique

Si l’eau se fraie un passage dans la roche calcaire, elle jaillit aussi à l’air libre et dévale les rochers, façonnant des gorges spectaculaires. Parmi elles, les gorges de la Bourne, impressionnantes de verticalité, s’admirent le long d’une route taillée entre Pont-en-Royans et Villard-de-Lans. La route des Ecouges, au-dessus des eaux impétueuses de la Drevenne, les gorges du Nan entre Cognin-les-Gorges et Malleval-en-Vercors, ou encore les gorges d’Engins sont autant de portes d’entrée vertigineuses dans le massif que l’eau, infatigable, a creusé au fil des millénaires. Cette eau vive est le terrain de jeu préféré des adeptes de sensations fortes : les fans de canyoning, mélange d’escalade, de spéléologie et de natation en eaux vives, profitent de spots d’un esthétisme grandiose. Dans les Ecouges, le Furon, le Léoncel, le Rio Sourd ou la Comane, les accompagnateurs guident ceux qui veulent s’adonner aux sauts dans les vasques remplies d’eau limpide, aux descentes en rappel le long des cascades ou aux glissades dans les toboggans naturels. Le canyoning est une activité d’été idéale dans le Vercors tant elle plonge dans une nature sauvage et préservée tout en offrant des sensations fortes inoubliables.

Canyoning ©Alexandre Gelin

Pêche et fraîcheur en été

Les contemplatifs apprécient le calme des berges ombragées pour une sieste pleine de fraîcheur, une baignade vivifiante ou une partie de pêche. L’eau invite ici à un retour à l’essentiel, dans des décors verdoyants et naturels. La Bourne serpente, indomptée, et recèle des coins secrets où s’accorder une pause ressourçante, en dehors des périodes de haut débit qui rendent la rivière dangereuse. Plus loin, la Vernaison offre des petits coins de fraîcheur, tout comme dans les gorges du Nan, riches en lieux intimistes et préservés. Les pêcheurs aiment, eux aussi, les eaux froides de montagne où fraient notamment les truites fario, sentinelles de la bonne santé des écosystèmes aquatiques. Au petit matin, s’installer en bord de rivière, lancer sa ligne dans le silence d’une nature paisible et admirer la course folle d’une eau pure que le territoire, conscient de sa vulnérabilité, veille à préserver. L’eau se décline aussi en vastes lacs, comme au Monteynard-Avignonet. Retenue hydroélectrique spectaculaire, ce lac est réputé pour ses brises thermiques propices à la pratique d’activités nautiques (planche à voile, kitesurf, wingsurf, voile). Naviguer ici est un enchantement, entre le turquoise irréel de l’eau, les montagnes environnantes et, dans les confins du lac, les vertigineuses passerelles himalayennes.

Peche ©pascal conche

Métamorphose hivernale : neige et glace

En hiver, l’eau dans le Vercors se fige et ralentit. Elle se fait cristal ou flocon, glace ou neige. Dans les gorges, les cascades gelées sont suspendues comme des orgues translucides et fragiles. Ailleurs, l’eau continue à ruisseler sous le manteau neigeux qui fait le bonheur des skieurs et des randonneurs en raquettes. Ici, la neige joue un rôle essentiel dans le cycle de l’eau : elle fond, s’infiltre dans les fissures de la roche, voyage dans l’obscurité du sol avant de surgir de nouveau des kilomètres plus loin, parfois des mois plus tard. En hiver, l’eau joue une partition silencieuse où se décline une harmonieuse variation de silences et de blancs.

Neige dans le Vercors ©Booth